Propos recueillis lors de PIX 2023, qui a eu lieu à la Plaine Images le 6, 7 et 8 avril 2023.

<aside> ➡️ Comment la formation s’adapte au séisme technologique des IA créatives ? Comment préparer les étudiants à des process radicalement nouveaux ? Quelles craintes et opportunités pour le marché du travail, dans les ICC ? En compagnie de Simon Vanesse, directeur d’ARTFX, Olivier Carlot, responsable pédagogique de Pôle 3D, Nacim Ihaddadene, enseignant chercheur chez Junia, et Gabin Bastard, étudiant chez Pôle 3D, nous avons mesuré l’impact des IA sur la formation, mais aussi relativisé certaines craintes.

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En résumé

1️⃣ Que ce soit pour l’animation ou le jeu vidéo, le passage d’un monde de simulation à un monde de génération est bien une révolution en soi… les réseaux de neurones n’ont plus besoin de simuler la réalité, ils sont capables de récréer la réalité : la fin de la 3D ? Une cohabitation 3D / réseaux neuronaux ? Il est encore trop tôt pour le savoir.

2️⃣ Il ne faut pas oublier que ces métiers sont parcourus par des innovations technologiques régulières ! L’adaptation permanente des formations a toujours été nécessaire : L’arrivée de la génération procédurale a apporté également un énorme gain de productivité , sans qu’on remette en question ses apports dans le flux de production. L’essor de l’IA participe aux questionnements permanents de l’équipe pédagogique, et il faut l’intégrer tout en n’oubliant pas les outils traditionnels.

3️⃣ Les fondamentaux essentiels à l’art et à la création persistent et une école qualifiée forment également ses étudiants à avoir “de l’œil”, à développer une sensibilité au beau et à s’adapter à une multitude d’outils.

4️⃣ Il est contreproductif de limiter l’usage des IA au sein des formations : au contraire, il faut pousser les étudiants à interroger les différents modèles d’IA disponibles, à regarder précisément comment ces outils fonctionnent, à “bidouiller” et créer des “happy accidents”. Et de citer des exemples précis de l’utilisation intelligente de l’IA dans sa formation : débogage, brouillon de synopsis, moodboard, évaluation de durée des dialogues… plein d’usages distillés au cours du workflow de création, qui augmentent la productivité et permettent de se concentrer sur son cœur de son métier.

5️⃣ Enfin, il faut mettre en place des règles pour en appeler à la responsabilité personnelle de chacun : transparence dans l’utilisation de l’outil, partage des prompts… intégrer une IA en restant honnête sur l’effort personnel fourni, c’est loin d’être de la triche !

Redécouvrez en replay cette table ronde, qui pose les bases pragmatiques d’une nouvelle ère pour la formation.

https://youtu.be/0CMkY5OkzhY

Le passage du monde de la simulation au monde de la génération

Les IA génératives sont au cœur de l'actualité et leur essor marquent probablement la fin d’une ère pour les industries créatives, et notamment dans le jeu vidéo et l’animation. Les professionnels de l’image s’accordent à dire que les fondamentaux technologiques bougent et que la stupeur a pu l’emporter dans un premier temps, à la découverte de ces nouveaux outils.

https://youtube.com/clip/UgkxU-bmDUMyy9cPBq3I6qh_PshQCrHGLxmn

« Je me sens un peu comme un peintre de portrait qui découvre la photographie et qui se dit “zut, je dois repenser ma façon de travailler, je dois repenser ma façon de voir l’art”. […] On vient de se rajouter un nouveau bras »

Simon Vanesse, ARTFX

L’émergence des IA génératives ne change donc pas fondamentalement les principes fondateurs de l’art et de la création, mais elle va probablement changer la façon de produire : on s’ajoute un nouveau bras, et un bras surprenant qu’on ne sait pas encore appréhender parfaitement.

Les technologies utilisées pour l’animation et les effets visuels ont finalement peu changé depuis la naissance des industries de l’animation et du jeu vidéo. Les outils 3D ont été pensés pour simuler une réalité, et ils ont énormément évolués au cours des décennies, tout en gardant les mêmes fondamentaux : on crée donc une caméra virtuelle, on ajoute des lumières virtuelles, des matériaux et textures virtuels, puis on spatialise les objets à l’aide de règles algorithmiques assez précises, et on capte comme avec un appareil photo, le rendu final. C’est un travail fastidieux qui demande du temps, et qui s’est amélioré en réalisme et fluidité tous les deux ans, avec des moteurs graphiques de plus en plus puissants.

Ce qui est troublant avec cette nouvelle génération d’outils, c’est qu’on fait table rase de ces fondamentaux : les réseaux de neurones génératifs n’ont pas besoin de simuler la réalité, ils ont une mémoire de la réalité qui leur a été exposé et sont capables de la générer d’un seul tenant.